Paul Kagamae, Yoweri Museveni

Yoweri Museveni (gauche) et Paul Kagamae (Droite)

Des sanctions doivent être appliquées contre des responsables du M23 et tous ceux qui leur fournissent armes, hommes et autre logistique. Dans le lot, Kampala et Kigali. L'Onu, qui joue, une fois de plus, sa crédibilité est obligée d'aller jusqu'au bout de sa logique si elle ne veut pas énerver ou révolter l'opinion congolaise. Toutefois, un os pourrait s'insérer dans l'engrenage. Il s'agit de l'attitude de Washington et Londres considérés comme les parrains des présidents Yoweri Museveni et Paul Kagame. C'est le dernier verrou à faire sauter.

Le Conseil de sécurité des Nations unies a tenu une réunion à huis clos le samedi 20 octobre 2012. Au centre des discussions, l'évolution de la situation dans l'Est de la République démocratique du Congo. Cette question est soulevée suite à l'attaque dont étaient victimes six Casques bleus indiens ainsi que des exactions commises sur des populations civiles. Le communiqué sanctionnant cette rencontre indique la volonté du Conseil de sécurité des Nations unies d'appliquer des sanctions ciblées contre les dirigeants du M23 et tous ceux qui leur fournissent des armes. Le Conseil de sécurité demande à tous les Etats membres «de soumettre d'urgence au comité des sanctions des propositions d'inscription sur la liste ».

Déjà, les chefs d'Etat et de gouvernement ayant pris part au XIVème Sommet de la Francophonie avaient levé l'option de solliciter de l'ONU des sanctions ciblées. De graves accusations pesaient ainsi sur des responsables politiques et militaires au point que la ministre Louise Mishikiwabo avait émis des réserves sur cette demande.

Dans le communiqué, le Conseil de sécurité affirme «son ferme attachement à la souveraineté, l'indépendance, l'unité et l'intégrité territoriale de la République démocratique du Congo et condamne fermement tout appui extérieur en faveur du groupe M23 ».

Par ailleurs, le Conseil de sécurité préconise «un dialogue constructif entre la RDC et ses voisins, notamment le Rwanda ». Le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon a été chargé d'entrevoir la possibilité de recourir à d'autres mécanismes diplomatiques pour faciliter le dialogue permanent et suivi entre les parties concernées par la crise dans l'Est de la RDC.

Le prétexte trouvé par le Conseil de sécurité pour se concentrer exceptionnelles sur la question est l'attaque des soldats de la paix des Nations unies et le personnel humanitaire. Les violations graves et répétées des droits de l'Homme préoccupent également le Conseil de sécurité. Des actes condamnés énergiquement par l'instance onusienne.

Face à ce tableau sombre, le Rwanda qui vient d'être admis au sein du Conseil de sécurité sera mis à rude épreuve, malgré ses dénégations. Dans le même lot, les parrains de Kigali et Kampala sont mis devant leur responsabilité d'autant plus qu'ils devront s'interdire d'interférer dans la bonne exécution de la position adoptée par le Conseil de sécurité.

Des fuites découlant d'un rapport confidentiel, à publier en novembre prochain, les experts onusiens sont formels : le Rwanda et l'Ouganda soutiennent les rebelles du M23. «Le gouvernement du Rwanda continue de violer l'embargo sur les armes en apportant un soutien militaire direct aux rebelles du M23, en facilitant leur recrutement, en encourageant et facilitant les désertions au sein des FARDC [armée congolaise, NDLR], ainsi qu'en fournissant des armes, des munitions, des renseignements et des conseils politiques », indiquerait ce rapport qui évoquerait une «série d'attaques »au cours du mois de juillet 2012 dans le territoire du Rutshuru et parle d'une «intervention directe des forces spéciales rwandaises »pour aider à prendre la ville de Kiwanja. «Les forces armées rwandaises ont armé les rebelles, facilité l'évacuation des blessés vers le Rwanda et partagé des équipements de communication avec le M23 », lit-on dans le document en circulation.

Le Conseil de sécurité exige l'arrêt immédiat de l'«appui extérieur »dont bénéficie le M23 et demande à tous les pays de la région des Grands Lacs de condamner ces groupes armés et de coopérer activement avec les autorités congolaises à leur désarmement et à leur démobilisation. «Le Conseil insiste sur l'urgence qu'il y a à engager des contacts et un dialogue constructifs entre la RDC et les voisins, notamment le Rwanda », écrit le site de la radio onusienne Okapi.
Enfin, le Conseil prie le secrétaire général de lui présenter un rapport spécial «sur les moyens possibles de faire en sorte que la Mission soit mieux à même d'exercer son mandat, non seulement dans la protection des civils, mais aussi sur la communication d'information sur les mouvements d'armes et de matériel à travers les frontières orientales du pays ».


Le dernier verrou

Pour que des sanctions soient effectives contre Kigali, Kampala et les dirigeants du M23, Washington et Londres doivent adopter une attitude de fermeté contre tous ces incriminés qui n'ont pas cessé leur implication dans l'instabilité de la RDC. Il serait paradoxal que ces deux capitales occidentales continuent de soutenir la boulimie prédatrice de Kampala, Kigali et autres multinationales déterminées à faire main basse sur les ressources naturelles de la RDC.

Pour plus de justice, l'opinion congolaise attend de ces deux membres permanents du Conseil de sécurité qu'ils érigent une ligne rouge à ne point franchir afin de contribuer à l'établissement d'une paix véritable dans la sous-région des Grands Lacs.
De l'avis de tous les observateurs, Washington et Londres constituent le dernier verrou à faire sauter pour voir s'appliquer les sanctions arrêtées contre le M23 et ses fournisseurs directs, en l'occurrence Kigali Kampala. Ils devront lâcher pour le retour d'une paix durable en RDC et dans les Grands Lacs.


Encadré

Le Conseil de sécurité condamne le M23 et exige la fin du soutien extérieur apporté à ce groupe armé
Préoccupé par la détérioration des conditions de sécurité et la crise humanitaire que connaît l'Est de la République démocratique du Congo (RDC), le Conseil de sécurité a fermement condamné vendredi le M23 et toutes les attaques qu'il a menées contre la population civile, les soldats de la paix des Nations unies et le personnel humanitaire.

Le 17 octobre, au Nord-Kivu, une embuscade avait été tendue à des soldats de la MONUSCO, faisant six blessés parmi les Casques bleus du contingent indien. Cette attaque est la dernière en date d'une série attribuée au Mouvement du 23 mars (M23), un groupe rebelle formé en mars dernier par d'anciens soldats congolais qui se sont mutinés et sont actuellement dirigé par le colonel Sultani Makenga. Le M23 s'était dans un premier temps regroupé autour de Bosco Ntaganda, un général sous le coup d'un mandat d'arrêt international émis par la Cour pénale internationale (CPI), qui l'accuse de crimes de guerre pour avoir recruté et utilisé des enfants-soldats dans des combats au Nord-est de la RDC en 2002-2003. Depuis le début des exactions menées par le M23, pas moins de 320 000 personnes ont été déplacées dans la province du Nord-Kivu depuis avril dernier.

«Le Conseil condamne également les efforts faits par le M23 pour mettre en place une administration parallèle et saper l'autorité de l'État et exige de ce groupe et des autres groupes armés, dont les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), qu'ils mettent immédiatement fin à toutes les formes de violence et autres activités de déstabilisation », indique la déclaration faite au nom des autres membres du Conseil par son président pour le mois d'octobre, Gert Rosenthal (Guatemala).

Le Conseil exige l'arrêt immédiat de l'«appui extérieur »dont bénéficie le M23 et demande à tous les pays de la région de condamner ces groupes armés et de coopérer activement avec les autorités congolaises à leur désarmement et à leur démobilisation. «Le Conseil insiste sur l'urgence qu'il y a à engager des contacts et un dialogue constructifs entre la RDC et les voisins, notamment le Rwanda ».

Il exige aussi des groupes armés qu'ils mettent fin immédiatement à toutes les formes de violence et autres activités de déstabilisation, demandant que les auteurs de ces actes soient appréhendés et traduits en justice.
Enfin, le Conseil prie le secrétaire général de lui présenter un rapport spécial «sur les moyens possibles de faire en sorte que la Mission soit mieux à même d'exercer son mandat, non seulement dans la protection des civils, mais aussi sur la communication d'information sur les mouvements d'armes et de matériel à travers les frontières orientales du pays ».

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